Hadrien Trudeau c. Hadrien Parizeau | Le Sac de chips
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Hadrien Trudeau c. Hadrien Parizeau

Par une ironie de l’histoire, la descendance de deux grands leaders québécois opposés l’un et l’autre pendant toute leur carrière politique se retrouve à porter le même prénom, de surcroit peu commun.

Lors du lancement de la campagne au leadership du Parti québécois d’Alexandre Cloutier le 13 mai dernier, l’appui du petit-fils de Jacques Parizeau n’a pas manqué de retenir l’attention.

Ce qui n’a pas manqué non plus au Sac de chips politique de retenir que les deux petits-fils du leader historique des fédéralistes purs et durs et du chef des troupes des purs et durs des indépendantistes se prénomment tous deux Hadrien.



Hadrien Trudeau, fils de Justin Trudeau, et petit-fils de Pierre-Elliot Trudeau, et Hadrien Parizeau, fils de Bernard Parizeau et petit-fils de Jacques Parizeau.

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Une rareté de pape

Il ne s’agit pas ici d’un prénom comme Nathan, William ou Mathieu (des Mathieu, il y a au moins 27, juste dans l’équipe du Sac), mais le singulier Hadrien

Adrien avec pas de «H» est plus courant, au 149e rang des prénoms populaires au Québec en 2015 avec 45 nommés, selon le répertoire de la Régie des rentes du Québec.

Mais Hadrien avec H, c’est encore moins courant qu’(H)Éloïse. Même Adrian, version très anglo d’Adrien est plus usuel au Québec: il y en a eu 35 en 2015 à être gratifiés de ce prénom, bon pour le 180e rang au concours de la popularité.

Hadrien n’a reçu le sceau d’approbation qu’à quatre reprises en 2015 (835e rang), et ce, malgré la popularité qu’aurait dû lui accorder la venue de Hadrien Trudeau en 2014 (quatre cette année-là aussi, incluant le p’tit Trudeau).  Soit autant qu’un prénom en forme de faute d’orthographe (Emyl) et d'un village des montagnes Rocheuses (Jasper). Ce qui reflète bien la dualité Québec-Canada, du reste.

S’il est trop tôt encore pour juger de l’engagement de Hadrien Trudeau, il en va tout autrement pour Parizeau, pleinement impliqué dans le Parti québécois et fervent indépendantiste. Il ne se dit même pas souverainiste, mais indépendantiste. La nuance est plus importante que vous ne le croyez.

Mais la question reste...

Pourquoi diable deux familles aux convictions si diamétralement opposées parviennent à s’entendre sur un sujet habituellement plus controversé qu’une blague de Mike Ward, soit le choix d’un prénom?

Quiconque a eu à choisir un prénom d'enfant sait qu'on a déclenché des conflits mondiaux pour moins que ça.

Provenant de familles à la culture générale si approfondie, pareil choix ne peut être innocent.

Hadrien, donc, n’est pas une fôte de frappe.

Wikipedia

Il n’est nul autre qu’un empereur romain qui a régné sur l’Empire pendant plus d’une vingtaine d’années, entre 117 et 138 de notre ère. Un empereur lettré, cultivé, raffiné.

Le lien se précise, maintenant.

Hadrien premier, comme Donald Trump

Comme le grand-père Parizeau, l'Hadrien originel il a été un grand mandarin de l'État, à la source de la plus importante réforme administrative de l’Empire romain, tout en procédant, comme l’a fait le grand-père Trudeau de sa vie politique, une réforme de droit et constitutionnelle d’importance.

Hadrien premier aura été presque contemporain avec ses homonymes du 21e. Notamment, il a réclamé l’aide médicale à mourir compte tenu de la maladie débilitante qui l’affectait (jusqu’à sa mort naturelle, finalement), et avait promis le renforcement des frontières de l’Empire, notamment en construisant un mur pour mettre fin aux invasions des Barbares : le mur d’Hadrien, encore debout 2000 ans plus tard, qui délimite plus ou moins l’Angleterre et l’Écosse.

Capture d'écran

AFP



Il avait aussi promis, en quelque sorte, des baisses d’impôt, si ses sujets daignent le laisser au pouvoir plutôt que de le renverser. En 118, il a fait annuler les dettes fiscales des Romains et brûler tous les registres de l’impôt.

À cet égard, il ne ressemblait à aucun des grands-papas de nos Hadrien. Les deux ont présidé, l’un comme premier ministre, et l’autre comme ministre des Finances, à la période la plus faste de l’histoire pour les augmentations d’impôts.

Même que grand-papa Parizeau s’était notamment fait élire en 1994 comme premier ministre du Québec en promettant de «faire autrement». Et en 1994, faire autrement, ça voulait dire faire autrement que la tendance lourde de l’époque, incarnée par le conservatisme fiscal de Mike Harris en Ontario, où les baisses d’impôts n’avaient d’égales que les coupes dans le gouvernement.

On connaît la suite : Parizeau démissionne, il est remplacé par Lucien Bouchard, qui, sans être élu, finit par gouverner le Québec autrement qu’autrement, en se donnant comme objectif principal l’atteinte du déficit zéro.